Aurélien Bambagioni, surfeur d’argent.

Aurélien Bambagioni fait partie de cette jeune génération d’artistes qui applique sans complexes le programme défini par le critique Nicolas Bourriaud lorsqu’il écrivait : “ L’artiste n’a plus pour but de produire des objets, mais des rapports au monde, des modèles de fonctionnement, mis en mouvement dans des entreprises ”. Evidemment, ces modèles ont encore besoin de vecteurs matériels sous forme d’objets ou d’images, mais la part la plus importante de leur réalisation passe par le création d’évènements et le détournement des réseaux de communication.

En endossant résolument les attributs du chef d’entreprise, Aurélien Bambagioni devient acteur de sa propre production, et il donne à sa société AB Création la dimension d’une véritable entreprise médiatique en explorant tous les supports à sa disposition, Internet, cinéma, merchandising…
En contractant le monde des signes comme territoire de sa production, il devient sémiote, sa trajectoire est celle du surfer lorsqu’il déchire l’enroulement de la vague. Mais dans le territoire des signes rien n’est univoque, et cette figure du chef d’entreprise, équivalent moderne du prince charmant, Aurélien Bambagioni la double du négatif Warholien de la star, Pop-star ou vedette médiatique, héros éphémère, marionnette et déchet de la Société du Spectacle. Cette Société du Spectacle, il en saisit les rênes délirantes comme un guerrier sur le dos du dragon, et il en pervertit les codes comme un hacker pirate des données informatiques. Avec lui, il y a toujours duplicité de la figure, dédoublement des signes, pour mobiliser la puissance du spectacle au profit de sa propre entreprise, revisitant, remixant cette sentence de Guy Debord : “ Le spectacle édifie son unité sur le déchirement, de sorte que la division montrée est unitaire, alors que l’unité montrée est divisée ”.

AB Création nous invite à contempler une extension du réel édifié dans le miroir de la société contemporaine et de ses mythes, et ce reflet nous éblouit comme les éclairs de ce super-héros de la Bande Dessinée américaine, le Surfer d’Argent.

Jean-Luc André, 1999