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La carte invisible 
livre publié par Ersilia / Le Bal en juin 2018

Atelier Mon Œil ! de la Fabrique du Regard / Le Bal
mené par Aurélien Bambagioni avec les élèves de Théo Boyadjian du lycée Albert Schweitzer au Raincy.
Fait au Raincy les 10, 11, 12 avril 2018
Édité et publié de façon collective sur Instagram dans un premier temps puis en livre.

Le workshop s’est déroulé sur trois demi-journées avec une classe de 1ère du lycée Albert Schweitzer au Raincy, encadrée par Théo Boyadjian. Je souhaitais proposer quelque chose qui pourrait se produire uniquement dans ce court laps de temps. Seulement 10 heures en tout et pour tout avec les élèves.
La première matinée m’a permis de montrer brièvement mon travail, avec quelques vidéos et d’expliquer aux élèves mon rapport à la caméra et à ma manière de publier des éléments en ligne de façon quasi instantanée.
Les contours du projet étaient encore un peu flous ce matin là mais l’idée principale demeurait de construire une fiction « invisible » pour eux, sans scénario, au fil de l’eau, générée par la retranscription de l’environnement dans lequel ils évoluent au quotidien et à l’aide exclusive de téléphones mobiles.
Ce récit s’est construit en trois temps. Un par jour ou presque. Les pauses entre les séances de travail nous permettant d’affiner Théo et moi la ligne éditoriale du projet. Puisque nous parlions depuis le début avec la Fabrique du Regard d’une restitution sous la forme d’une édition en ligne.
Dans la dernière heure du premier jour, nous avons décidé que c’était Instagram qui nous servirait de support de publication. Et de captation. Parce que tout le monde parmi nous possédait un compte et que chacun maitrîsait les codes et les usages de ce réseau social. Toutefois, nous avons choisi d’ouvrir un compte commun pour le projet. Ainsi nous aurions tous la main pour publier en même temps. Mais publier quoi ? Simplement Le Raincy. Celui de ces jeunes gens. Une vision à un temps T d’une ville de banlieue parisienne, qui passe pour être chic au milieu des autres. Celle d’une ville qu’ils connaissent peu puisque la plupart ne s’y rendent que pour aller au lycée. Une ville presque invisible pour eux, si ce n’est depuis les fenêtres des transports en commun ou celles de l’établissement où ils étudient.
Ce qui n’est plus palpable dans le projet, c’est l’effort et l’énergie déployés pour sa construction. Une ville s’apprend en marchant et nous avons établi un parcours à faire à pied avec comme seuls points de repère quelques éléments historiques glanés volontairement sur la page Wikipédia du Raincy. Ainsi le deuxième matin, nous avons arpenté la ville pendant les quatre heures de mon intervention. Du lycée Albert Schweitzer jusqu’à l’église « Notre dame du Raincy » d’Auguste Perret en passant par l’aqueduc souterrain de la Dhuis, construit sous Napoléon. Une déambulation qui nous a permis de discuter, de scruter, de palper. De flâner. De voir et sentir avec notre corps ce qu’était le Raincy qui s’offrait à nous, dans ce périmètre exclusif, et ce que pourrait être cette restitution d’atelier. Des quartiers, des maisons, des noms, des détails, vus à travers le prisme de téléphones mobiles d’adolescents transformés presque uniquement en appareils photos et enfin retournés vers l’extérieur. Ce qui était invisible au départ, pour nous tous, c’était quelle trace allait laisser ce parcours. Devenu carte au trésor ou plan d’introduction au projet sur Instagram. Circuit révélé par une suite de clichés orchestrés parfois à contretemps ou à contrecœur.
La troisième et dernière séance de travail aura été de réordonner tout ce qui avait été publié la veille durant la marche et de la rendre plus ou moins lisible à tout un chacun par un protocole assez simple mais tout aussi fastidieux : classer l’ordre des photos, les enregistrer, les effacer de la plateforme et les republier en ajoutant sans trop les illustrer des phrases tirées de la page Wiki du Raincy que nous avions lues ensemble le premier jour. Partage de connexion Internet. Copier-coller dans des notes sur le téléphone. Copies d’écran. Nous avons donc mis en exergue des passages de ce que nous avions parcouru physiquement la veille. Pour les insérer dans notre histoire. Comme des cartouches. Comme Godard au cinéma, comme Beckett au théâtre.
Aucun n’autre outil que le téléphone mobile n’aura donc été utilisé pour cet atelier. La carte invisible existe. Elle est de Inès Belghit, Cerena Boukhanoufa, Mélissa Fermely, Yasmine Hassani, Lysa Kesraoui, Axelle Le Guen, Antoine Meriais, Kellyane Oberland, Annabella Simon da Rocha et Célya Taklit. Elle se trouve ici et témoigne d’un territoire tout aussi réel que fictionnel : https://www.instagram.com/carte_invisible/

 

Suite à une résidence de recherche/production sur l’année 2018, La carte invisible intègre également Ersilia, la plateforme d’éducation à l’image du Bal